Un peu hors sujet, mais votre papotage me fait penser à ce texte de M Onfray
extrait
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L’un des signes de cet effacement du réel est l’effacement du mot qui dit le réel. Quiconque met le signifiant sous le tapis croit avoir aboli le signifié. Ainsi, il n’y a plus declochards, mais, d’abord des sans domiciles fixe, avant que ceux-ci ne laissent place aux SDF ; il n’y a plus de nains, mais des personnes de petite taille ; plus de gros, mais des personnes en surcharge pondérale ; plus d’avortement, mais des Interruptions Volontaires de Grossesse, puis des IVG ; plus de contraception, mais un contrôle des naissances ; plus de prolétaires, mais des OS, des OQ, des OP – autrement dit des ouvriers spécialisés, des ouvriers qualifiés, des ouvriers professionnels ; plus de ceinture ou debanlieues, mais des ZUP et des ZEP ; plus d’handicapés, mais des personnes à mobilité réduite , voire des « personnes en situation de handicap »; plus de noirs, mais des blacks ; plus de femmes de ménage, mais des techniciennes de surface ; plus d’allocations, mais des aides, voire des RSA ; plus de juifs, mais des feujs ; plus de maghrébins, mais des beurs ; plus d’émigrés ou d’immigrés, mais des migrants ; plus de vieux, mais des personnes du troisième âge ; plus d’homosexuels, mais des gays ; plus de chômeurs, mais des demandeurs d’emploi ; plus de téléphone, mais des iPhone ou des Smartphones ; plus de droits de l’homme, mais des droits humains ; plus de tiers-monde mais des pays en voie de développement ; plus de prostituées, ni de putes bien sûr, mais des travailleuses du sexe ; plus d’élèves, mais des apprenants ; plus d’instituteurs, mais des professeurs des écoles ; plus de professeurs, mais des enseignants ; plus de ballons, mais des référentiels bondissants ; plus de lectures sur scène, mais des mises en voix ; plus de romanichels, mais des gens du voyage ; plus de sexe, mais du genre ; plus de races, mais des peuples ; plus de mensonges mais des contre-vérités ; sans parler des tsunamis qui ont remplacé les raz-de-marée ou les congères qui prennent la place des tas de neige, voire de la neige à laquelle la vulgate médiatique substitue désormais le stupide manteau neigeux …
Voilà comment on ne peut plus parler de marchandisation d’utérus puisqu’il s’agit d’une gestation pour autrui ; ni de crimes de guerre puisque ce sont des dommages collatéraux. De même pourquoi ferait-on encore la révolution puisqu’il n’y a plus ni prolétaires ni femmes de ménage, ni chômeurs ni clochards. Et pourquoi y aurait-il encore une école puisqu’il n’y a plus ni instituteur ni professeur ? Rabelais faisait dire à Pantagruel : « Si les signes vous fâchent, ô quand vous fâcheront les choses signifiées ? ». Les signes étant morts, les choses signifiées le sont aussi. Le désert avance…
Michel Onfray, 2016